Monfils, sa douleur

Publié le par jean-Jacques

Des blessures, Gaël Monfils en a connues dans sa carrière. C'est notamment ce genou, le droit, qui le fait très (trop) régulièrement souffrir en raison d'une rotule bipartite (en deux parties). C'est ce genou qui l'a obligé à renoncer à Roland-Garros, "le tournoi de sa vie". Durant deux mois, le Parisien ne s'est pas exprimé. Dans les colonnes de L'Equipe, il raconte ce mardi son chemin de croix. Où tout a commencé à Rome, en mai dernier. "Le matin de mon premier tour, c'est hyper violent, raconte Monfils. Je n'arrive pas à courir. Je gagne contre (Alex) Bogomolov mais ensuite, quand je perds contre (Juan Carlos) Ferrero, dans le vestiaire, je sens une douleur maximale. J'essaie de ne pas trop le montrer, mais j'ai le genou en feu."

La semaine suivante, il perd à Nice au premier tour contre l'obscur Bryan Baker mais il comprend surtout que "ça ne passerait pas pour Roland." "Un calvaire", dit-il. C'est là que "tout s'est effondré""Je n'ai rien dit pendant deux mois parce que c'était trop dur de parler, confie l'ancien n°1 Français. C'est la première fois que je ne pouvais pas faire Roland et je l'ai très mal vécu. (...) Se retirer de certains tournois, c'est chiant. Mais Roland, c'est mille fois pire. C'est le pire !" Et c'est le début de la traversée du désert pour "La Monf'". "Je ne dormais plus. Je m'en voulais. Et pourquoi j'y suis pas ? Pourquoi, merde ! Je n'avais envie de rien. Pas envie de me lever le matin. Je me cassais la tête tout seul à force de réfléchir. Ouais, je déprimais. Mais finalement, toute cette histoire m'a montré à quel point j'aimais jouer au tennis, à quel point j'aimais ce sport. Putain, qu'est-ce que je l'aime, ce sport !"

Impossible pour lui de ne pas regarder ses potes sur les courts de la Porte d'Auteuil, et notamment Jo-Wilfried Tsonga, qui l'a "fait rêver" contre Novak Djokovic. Mais Monfils est en souffrance. Et se cherche. Il a besoin d'ailleurs. "J'ai suivi Roland-Garros mais j'étais loin. J'ai commencé par me raser la tête et puis je suis parti très, très loin. Tout seul. J'ai bougé dans plusieurs endroits. Certains où je n'étais jamais allé. A un moment, j'ai débarqué sur une île que je ne connaissais même pas. J'avais besoin de ça pour me poser les bonnes questions." 

"Reprendre aux Jeux, ce serait magique"

Seul, Monfils fait le point. Il entame son introspection, et se remémore les conseils de Phillipe Manicom, son ancien kiné, décédé l'an dernier. "J'ai terriblement pensé à lui, à ce qu'il me dirait s'il était encore là. C'est parti loin... Je me suis souvenu aussi des paroles de tous mes anciens entraîneurs." A bientôt 26 ans, l'ancien n°7 mondial repense à ses jeunes années, au Monfils qui dominait le tennis mondial chez les juniors, à l'image du petit chelem (Open d'Australie, Roland-Garros, Wimbledon) réalisé en 2004. "Je me suis fait une synthèse : à un moment, j'ai été prêt et préparé pour gagner. Je n'étais pas là pour bien jouer, j'étais là pour gagner. Dernièrement, j'avais perdu cette hargne. Faut que je laisse s'exprimer ce fighting spirit."

Monfils avait besoin de se recentrer, de prendre des décisions. "Le forfait à Roland, ça m'a mis une bonne gifle. Je ne veux plus que ça m'arrive. J'avais besoin de tout remettre à plat. De me recadrer. De faire de nouveaux efforts. Et aussi de plus m'écouter. J'arrive à un moment de ma carrière où on ne m'impose plus les choses. Je dois me les imposer à moi-même." Pour la première fois de sa vie, l'ancien protégé de Roger Rasheed a accepté de subir une injection dans le genou meurtri. Il s'est même attaché les services d'un nutritionniste, d'un podologue et il est même allé consulter Marc Raquil, l'ancien coureur de 400 mètre reconverti comme coach, avec qui il a effectué "la prépa la plus costaud de sa vie."

Mais reste le tennis, le jeu. "Je n'ai pas touché une raquette depuis le 23 mai, je n'en peux plus ! J'ai la dalle." Encore forfait à Hambourg cette semaine, Monfils, désormais 17e mondial, a désormais la tête à Londres. Quart-de-finaliste aux Jeux de Pékin, le Parisien figure dans la délégation tricolore, et nourrit désormais quelques songes olympiques. Mais, réalité oblige, il est obligé de rester prudent. "Reprendre aux Jeux, ce serait magique. J'y pense tous les jours ! Mais imaginez si je me pète : pfff, ça pourrait m'achever. Et puis c'est l'équipe de France. Je ne peux pas arriver en touriste." Le compte à rebours est lancé.

Publié dans sports

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